14 avril
Nous voici réunis sur le quai de la gare
de Belfort, nos sacs à dos, sacs
de voyage déposés sur le sol, les retrouvailles sont chaleureuses, l’équipe
est à demi complète, nous retrouverons l’ensemble
du groupe au départ d’Orly. Arrivés
à l’aéroport aux environs de 15 heures devant le comptoir
de la compagnie
aérienne Biman, enregistrement des bagages, puis attente interminable. Après
les formalités d’usage, nous embarquons
à bord
d’un DC10 de la Compagnie
Bangladesh Airlines, destination Dacca.
20 h 45 :décollage…
15 Avril
3h du matin, altitude 37 000 pieds, température extérieure -46° C, vitesse
640 mph, la visibilité est excellente.
Le jour se lève et déjà nous
apercevons les premières chaînes de montagnes par temps clair, la vue est
incomparable : sur la gauche
se profilent dans le lointain les montagnes
enneigées et sous l’appareil
se déroulent les cours d’eau.
Nous
reconnaissons les sommets de plus
de 8000 m dont les fameux Anapurnas
et l’Everest
(observer le plus merveilleux spectacle de la nature est un privilège rare).
Dans l’avion le mot "Himalaya "
se répand comme une traînée
de poudre,
les passagers s’agitent. Isabelle a eu
la gentillesse de me céder
sa place auprès
d’un hublot au départ d’Orly.
En progression le long de l’interminable
chaîne Himalayenne, l’appareil approche
de Dacca, Capitale du Bangladesh,
plate-forme importante du Golfe du Bengale
et du Sud-Est asiatique.
L’atterrissage est toujours un moment impressionnant , puis nous nous
retrouvons en salle de transit.
Notre prochain avion : un Airbus A310.
Cap
sur Katmandou : chaleur et humidité règnent sur la piste d’envol, le
ciel bas est gris. Décollage parfait. Vol sans histoire,
la visibilité est
nulle.
Aéroport de Katmandou : nous récupérons nos bagages à la sortie
et
sommes accueillis par toute l’équipe de "Trinetra Adventure"
avec,
à leur tête, notre Ami Sunar,
une jolie Népalaise (Lalmaya, la femme
de Sunar) nous passe autour du cou
un collier de fleurs en signe
de bienvenue.
A vive allure et à grands coups de klaxon, notre minicar slalome dans la ville,
force
le passage entre les pousse-pousse
et les vaches immobiles au milieu de la
route.
On a beau s’y attendre,
c’est vrai, la vie ici s’est arrêtée au
Moyen Age,
le plongeon est immédiat, quel choc !
Un brin de toilette, et le temps de mettre un peu d’ordre
dans nos sacs, d’échanger
quelques dollars contre des roupies
et nous voilà de retour en ville.
Ce qui
frappe le plus à Katmandou, c’est
la présence
du Sacré.
La soirée est consacrée à la visite
des monuments historiques
et culturels
" de Durbar Square " commentée par Christian : le
Palais Royal, puis une visite de la maison-temple de la Déesse vivante Kumari,
la réincarnation de Taleju.
Dans la cour intérieure, nous avons attendu en
vain l’apparition à sa fenêtre. Sur la place, une vieille pagode s’impose
à la vue, c’est le temple de Taleju
qui remonte aux premiers temps.
Soirée chaude et calme à Katmandou, alors qu’il neige à Belfort.
Nous
dînons dans un restaurant tibétain où nous partageons la salle avec
un groupe
bisontin en partance pour le tour des Annapurnas avec Trinetra puis toute l’équipe
rallie l’hôtel Harati pour prendre
un dernier verre à la belle étoile.
Notre journée s’achève avec des images plein la tête, une bonne nuit de
repos
et demain… l’aventure commence ! !
Denis Courtot
16 avril
Après une nuit réparatrice, l'aube arrive tôt sur
Katmandou, et dès 6 heures du matin, le cortège de motos pétaradantes,
rickshaws ( ou pousse-pousse si vous préférez! ) et les bruits de la rue
ressurgissent des ténèbres …Katmandou s'éveille! …Nous nous retrouvons
dans le restaurant de l'hôtel Harati, et petit à petit les Frenchies
s'installent à table avant d'aller
se servir d'un déjeuner-buffet à volonté.
Il a été décidé que les "anciens" du trek de l'an dernier iront
visiter Patan, et que les nouveaux
dont je fais partie resteront sur Katmandou
pour une visite des sites les plus marquants de la ville…Nous avons laissé
nos colliers de fleurs dans les chambres, la fatigue du voyage et des heures
d'attente à Dacca, mais le jardin
et le parc de l'hôtel où nous sommes
est une
invitation à lézarder sous un soleil déjà brûlant!
Anup sera notre guide et le minibus qui nous attend laisse à peine le temps
aux
deux fumeurs du groupe de goûter
à leur meilleure cigarette,
celle du matin !Dès que le minibus s'engage dans la rue, Katmandou s'offre
à nos yeux ébahis
par l'activité des commerçants, dans leurs boutiques
à même la rue, ouvertes
sur
les regards des passants et le spectacle est là, dans ces quartiers de
viande que l'on découpe dans les fumées d'échappements, dans les monceaux
de
beignets empilés sur des étagères
de papier gras, les tissus colorés des
boutiques des tailleurs, qui volent
au vent, les SDF encore endormis sur Ikhapokhari, les femmes et les enfants fouillant
des dépôts d'ordures pour y
trouver de quoi recycler ce qui
est encore en état, des enfants en uniforme
allant à l'école, une vache sacrée égarée et créant un début
d'embouteillage…
Nous arrivons à BODHNATH, un des sanctuaires du bouddhisme tibétain, peuplé
de réfugiés ayant fui l'invasion chinoise
au Tibet. La couleur pourpre des
moines bouddhistes se détache des passants
de la ruelle qui nous amène au
Stupa,
le temple bouddhiste à cinq terrasses où les yeux du Bouddha nous
fixent dès notre arrivée…La place circulaire qui entoure
le temple est
jalonnée de boutiques d'objets tibétains, où nous irons exercer un peu plus
tard notre aptitude, ou pas! ,
à marchander les prix pour obtenir statuettes,
colliers, bagues et parchemins, mandalas et encens,
et l'incontournable baume du
Tigre, selon moi fabriqué
en Chine, mais là n'est pas la seule raison de notre
venue ici. Anup nous explique l'architecture du Stupa et son symbolisme, dans un
français impeccable, nous ne
le connaissons pas encore, mais
sa gentillesse, et
sa patience
avec nous sont déjà évidentes.
Nous faisons lentement le tour du temple. Des pèlerins font tourner les moulins
à prières, alors qu'un d'entre eux arpente sous nos yeux le chemin qui borde
le temple, fait quelques pas
et se prosterne face au cœur du Stupa et s'allonge
face au sol, de tout
son long. Quelque part s'élèvent les voix graves
et
incantatoires des moines bouddhistes d'un temple où nous irons tout à l'heure.
Un haut-parleur diffuse des incantations
et la silhouette du temple et les
prières imprimées sur des tissus colorés volant
au vent nous plongent dans
une atmosphère
si différente des lieux
de prières d'Occident.
Si cette ambiance saisit certains d'entre nous, d'autres futurs trekkers
sont
déjà dans les achats de souvenirs à rapporter en France, et comme des
enfants, font état de leurs trouvailles et des prix qu'ils en ont retiré!
De
mon côté, j'essaie
de capturer l'ambiance du lieu et mon appareil photo se
déchaîne sur cette lumière qui inonde la coupole du Stupa
du sommet duquel
certains arrosent le lotus symbolique du temple d'une peinture jaune-orangée
pour y dessiner en
de longues coulées ruisselantes les pétales
de la fleur
représentant la pureté
de l'homme ayant connu l'Eveil, le Bouddha …Certains
d'entre nous se risquent
à entrer dans un monastère donnant
sur
la place où
trône le Stupa, et avancent entre deux rangées de moines chantant des
incantations, le bras levé et après avoir versé quelques roupies dans un
tronc destiné aux offrandes du public, face
au portrait
du Dalaï-Lama et d'une
statue recouverte d'or du Bouddha, en ressortent copieusement arrosés de riz en
signe
de bénédiction…Des impressions inoubliables…La seconde partie de notre visite
de Katmandou va nous amener
à PASHUPATINATH,
toujours à l'est
des environs de la ville,
et qui est le lieu sacré de
crémation du Népal, on pourrait comparer ce site à Bénarès, en Inde .
Ici
ne coule pas le Gange, mais la rivière Bagmati, dont les eaux sacrées
recueillent et emportent tout comme celles du Gange, les cendres
des défunts.
Alors que BODHNATH est consacré au bouddhisme tibétain, PASHUPATINATH nous
plonge dans le décor de l'autre grande religion
des Népalais, l'hindouisme. La
veille, Christian nous en avait donné
les fondements et dépeint quelques nomsde
divinités, lors de notre première ballade sur Durbar Square; aujourd'hui…
démonstration!…Nous arpentons une rue très animée et bordée de boutiques
consacrées pour la plupart
au culte
des morts, mais ce qui fait la différence
ici avec nos bondieuseries occidentales
ce sont les couleurs vives et
chatoyantes des guirlandes
de fleurs fraîches tressées et assemblées sous nos
yeux, les pigments
qui servent à colorer les tissus flashent dans la lumière
du soleil de midi,
des odeurs d'encens et de nourriture s'entremêlent dans
l'air, difficile d'imaginer qu'à quelques mètres de nous des personnes
défuntes sont
en train d'être incinérées sur les rives de la Bagmati .
Un
peu plus loin,
le Golden Temple et son porche d'entrée nous font entrevoir
l'énorme statue d'un taureau recouvert d'or, mais malheureusement, l'accès
est
interdit
aux non-Hindous, et nous
en sommes! Des gardes surveillent l'accès
à
la cour où se trouve la statue, et il est inutile de forcer le passage!
Enfin, nous accédons à un pont qui nous emmène de l'autre côté
de la
rivière et
la vue de tout le site s'offre à nos yeux, l'impression
est à la
fois étrange, fascinante et a de quoi nous glacer
le sang…
En contre-bas, nous
apercevons les bûchers de crémation, les "ghats",
où une personne
est en train de brûler,
la fumée monte dans l'air libre,
et la famille reste
autour recueillie dans la prière…Tout à côté, un cadavre enroulé dans
un
linceul coloré, attend d'être incinéré lui aussi sur un autre bûcher, et un
peu plus loin, des offrandes à la rivière sont faites par une famille dont un
membre apporte
à plusieurs reprises des hottes en osier remplies de fleurs
orangées et rouges,
et les verse dans l'eau grise
et sombre
de la Bagmati…Certains
d'entre nous
se demandent s'il faut prendre des clichés de ce que nos yeux ne
peuvent éviter
du regard, certains "shooteront" sur
les
incinérations, d'autres ne le feront pas…
Nous nous sommes rapprochés
de
quelques sadhu, ces ascètes enduits
de cendres qui ont fait vœu de renoncement
au monde; ils portent
en tatouage ou sous forme d'un objet,
le symbole du
Trident et nous savons (depuis peu pour tous les nouveaux!) qu'ils ont mis leur
dévotion au service de Shiva .De l'endroit où nous sommes, nous apercevons
face à nous
les toits dorés
des nombreux temples avoisinants et tous portent
le même trident à leur sommet.
Ensuite nous continuons à remonter
la colline où
une succession de petits
monastères et temples jalonnent le parcours
et l'endroit semble habité plus
par les singes que par les hommes.
Mais nous avons été repérés par des
enfants
et quelques adultes qui ont flairé
le touriste en mal d'exotisme!
Certains objets qu'ils nous proposent sont effectivement superbes, notamment
des
tapis tressés en grosse laine, mais
les prix ne sont pas trop népalais dans
l'âme! Annie, par sa douceur de tous
les instants est la cible d'enfants
auxquels elle a bien du mal de faire face, et ceux-ci ne la laissent pas
tranquille jusqu'au bus où nous allons embarquer pour la prochaine destination…Va-t-elle
craquer pour quelques pacotilles? Oui?! Non?!…Finalement non, Annie a
résisté, mais pour combien de temps encore?!!!…..La chaleur continue à s'accentuer
( clin d'œil
au temps qu'il fait à
Montbéliard où il a, paraît-il, neigé !) lorsque après avoir repris le
minibus, nous faisons route et arrivons peu après à BHAKTAPUR (encore appelée BHADGAON) , fondée
au 12ème siècle, et autrefois capitale royale
de la vallée de Katmandou. Son nom se traduit par "La Cité des
Dévots" en népali .
La ville est une concentration incroyable de temples, de palais
et de maisons
anciennes et superbes, aux fenêtres sculptées dans le bois, l'absence de
vitres étant remplacées par des dentelles de bois sculpté, vraiment
surprenant tout ça ! Nous ne manquerons pas de photographier
la plus belle
"vitre" en bois, la Mayur Jhyal, sculptée sous la forme d'un paon
faisant
la roue…de toute beauté.
Nous entrons sur Durbar Square,
une immense place gardée par deux statues
colossales de lions. La place
est entourée de temples monumentaux, dont le
temple Batsala, le temple Siddhi Laxmi, le temple Yakscheswor, Chardham
et
Terracota .
|
L'absence de voitures sur
la place et dans les rues de la ville sont
un bonheur pour nos
oreilles encore mal remises des tumultes
fumeux
et pétaradants de Kathmandou!
Grâce aux explications d'Anup,
ces monuments prennent tout leur sens
et au
hasard des promenades nous découvrons aussi le palais royal
et les bains
royaux, la Porte d'Or qui resplendit au soleil de midi et le temple
de Pashupatinath, célèbre pour ses figures érotiques sculptées dans le bois…et
tout près desquelles nous allons nous rincer …la gorge, car il fait de plus
en plus chaud!
Nous n'avons que peu de temps encore avant le départ pour Gorkha demain, aussi
la fièvre des souvenirs s'empare du groupe qui se disloque un peu pour pouvoir
effectuer nos achats, pour une bonne heure encore avant
de retourner à
l'hôtel. Nous prenons néanmoins le temps
de déambuler dans les rues
avoisinantes, peuplées de touristes de plusieurs pays, mais ce sont les
Népalais qui sont encore les plus nombreux, heureusement.
Au bout d'une heure
et demie et d'un orage pas trop méchant, nous nous retrouvons tout près de la
porte aux Lions, et chacun y va de ses p'tites emplettes marchandées au plus
bas, bien entendu, sauf peut-être
pour Annie, qui, une fois
de plus, n'ose
faire baisser les prix
et pousse
des oh… et des ah… d'étonnement quand elle
nous voit marchander
dans les rues de la ville!
Michèle, par exemple, à qui un jeune Népalais essaie de revendre un Khukri,
sorte de long couteau gainé de bois sculpté
et de cuivre, un bel objet somme
toute, pour la modique somme de US$ 200 ( soit 1400Frcs ) verra le prix fondre
au soleil par mon intermédiaire
sur le trajet
à pied qui nous ramène au bus,
et malgré son refus de l'acheter parce que, selon elle, c'est une pacifiste, le
couteau finira par être vendu 400 roupies népalaises, soit 40 Frcs…en
désespoir de cause, car Michèle
est et restera toujours pacifiste jusqu'à
l'intérieur du bus !!!
Puis c'est le retour à Katmandou, et
le minibus qui nous laissera à quelques
centaines de mètres de l'hôtel pour
je ne sais quelle raison, fera une fois
de
plus notre bonheur, car c'est décidé, Michèle, Eyup et votre serviteur
ont
décidé de frapper fort une fois de plus,
et nous engrangeons
dans nos sacs en
plastique noir, pantalons multicolores, penjabis, tuniques, puis c'est le tour
d'un marchand de parchemins et de lampes
en batik chez qui le marchandage
se
terminera à la bougie, et le commerçant bavard
et convaincant au départ, la
tête entre les mains à l'arrivée, n'y comprenant plus rien sur ce qu'il est
en train de nous vendre, à prix sacrifiés!
Les bras chargés de souvenirs, nous arrivons à l'hôtel, après avoir arpenté
des rues sans le moindre réverbère, dans un dédale indescriptible
de
rickshaws,
de voitures et de passants, le tout dans un air saturé
de fumées
d'échappement
et de coups de klaxons, la vision est apocalyptique dans cette
pénombre,
et l'adrénaline à son taux maximal!
Nous retrouvons l'ensemble du groupe dans le salon de l'hôtel, au calme,
et
après avoir comme tout un chacun, délesté son lot de souvenirs
et d'achats de la
journée dans les chambres de l'hôtel, nous décidons d'aller nous sustenter dans
un restaurant populaire, qui n'a rien à voir avec
le restaurant tibétain de la
veille, mais la nourriture y est chinoise, copieuse et plutôt correcte. Le
moment est venu pour chacun de raconter sa journée
et ses impressions, et
l'atmosphère est bavarde, conviviale et relaxante
Puis c'est le retour à l'hôtel, enfin pour certains, car Eyup n'a pas dit
son
dernier mot pour faire un peu de "late shopping" et finalement, la
nuit va être courte,
car demain commence le trek, et nous devons prendre le bus
jusqu'à Gorkha. Katmandou semble s'être véritablement endormie,
il est bientôt minuit.
Extinction des feux….Bonne nuit !
Jean-Luc Dey
17 avril
Ce matin est différent : nous
partons pour le trekking… et Laprak. Regret
de Katmandou, entrevu seulement
– nous retrouverons la ville dans dix jours. Mais le sentiment dominant a pour
nom impatience ! La chambre Michèle-Christine s’est donc réveillée
très tôt, pour ranger les bagages
de ville et préparer les nouveaux sacs,
avec force questions réciproques
sur ce qui sera… très nécessaire… ou seulement utile…
ou peut-être agréable. Je n’ai
pas l’expérience des longues marches,
et admire l’organisation du sac de
Michèle.
Lorsque nous descendons pour le petit déjeuner à l’heure fixée, 7 heures,
surprise : une grande partie du groupe
est déjà installée; l’impatience
ne nous
est donc pas réservée ?
Le départ se fait attendre, et le hall
de l’hôtel Harati, bruissant
des
bavardages des apprentis trekkeurs, semble trop petit pour hommes
et sacs. Enfin
le bus, qui nous attendait devant l’entrée de l’hôtel,
est chargé.
Départ à 8 heures 30, avec pour chef accompagnateur Anup – Sunar, parti plus
tôt avec le matériel, nous retrouvera à Gorkha.
Le ciel est très clair, l’air encore frais. Cap vers l’ouest. Il nous faut
d’abord traverser la vieille ville, contempler une fois encore le spectacle de
la rue népalaise, animée d’une foule colorée, nous faire un passage
dans ce
grouillement de véhicules à deux, trois, quatre roues. Un peu plus tard,
on
respire un peu mieux sur de larges boulevards, occupés cette fois par ces
drôles de camions, tout " enguirlandés ", comme pour une
fête quotidienne.
La route qui quitte la vallée de Katmandou conduit à un escarpement dont on
redescend par une succession de virages en épingles
à cheveux plutôt
impressionnants. Le bus roule vaillamment, malgré
sa charge, et la route,
longeant
la large vallée de la Trisuli, traverse nombre de hameaux et villages.
Sur les tronçons plats, poussent blé et orge.
Il commence à faire très chaud. Soudain, bruit étrange annonciateur,
on s’arrête :
un pneu du bus est crevé ! Pendant que le jeune garçon qui avait, avec
vigueur, aidé
à la circulation de notre véhicule dans les artères de la
capitale, part dans un village proche à la recherche d’une chambre à air,
nous explorons
les lieux : quelques maisons de part
et d’autre de la
route, la rivière en contrebas, où je vois descendre deux tout petits gars, l’un,
marchant sans doute depuis peu, pieds nus et les fesses à l’air. On est vite
autonome, lorsqu’on est enfant au Népal !
Le temps passe. On décide d’aller
se désaltérer dans un petit café, juste
en face de notre arrêt forcé.
Un petit perroquet, dans sa cage, va distraire
les voyageurs des ennuis mécaniques. Notre oiseau amuse beaucoup Anup…
Lorsque nous repartons, une bonne heure plus tard, le ciel s’est couvert.
Arrivée vers 13 heures
à Mugling, gros bourg où nous devons déjeuner. C’est
le premier Daal Bhat, prestement servi dans une grande salle. D’aucuns diront
que ce Daal Bhat là a fortement compromis leur santé à venir. Et lorsque nous
faisons mine
de quitter
la table, une chèvre de bonne taille, qui paraît avoir
ses entrées dans le restaurant, vient sous notre nez finir nos assiettes…
Arrivés vers 15 heures à Gorkha, siège ancestral de la dynastie des Shah,
cette dynastie – j’écris ces lignes en juin – vient d’être
sérieusement décimée dans une tuerie qui pourrait bien ressembler à un coup
d’état.
Revenons à nous : nous attendons en haut de la ville Sunar et les
porteurs. Hélas, ceux-ci ne sont pas au complet, le portage du matériel divers
destiné à Laprak nécessitant un grand nombre d’hommes,
et l’on craint d’être
obligé de rester une nuit à Gorkha.
Il est finalement décidé de rejoindre
le
premier campement avec les porteurs qui sont là, et pour la première fois,
nous assistons aux préparatifs qui seront, pendant dix jours, notre vision
quotidienne : chaque porteur arrime
sur son dos un imposant chargement,
se
relève plus ou moins difficilement et, parfois pieds nus, parfois
en tongues,
nous précède, et à quelle allure ! sur le chemin à gravir.
Scène de
chaque matin, que je ne vis pas toujours facilement…
La montée tranquille dure à peine trois quarts d’heure et nous arrivons
sur
un petit plateau, dominé par le palais du roi Narayan Shah. Très vite
les
tentes sont montées, déjà les cuisiniers s’affairent,
et c’est le premier
thé en plein air. Des enfants, curieux, sont bien vite là à nous regarder,
comme ils le seront à chaque campement proche d’un village.
Certains
entourent Alain qui a sorti
son livre
en népali. L’un d’eux, yeux magnifiques presque clairs et blouson étoilé de
trous et de taches, sait très bien lire aux dires d’Alain. Un peu plus tard,
nous sommes quelques-uns
à faire la petite ascension
du château.
Avant le repas du soir (je me souviens d’un excellent gâteau, inattendu,
en
dessert), chacun scrute l’horizon, espérant y découvrir la chaîne
himalayenne. Ce sera peut-être pour le lendemain ! La nuit semble douce,
le ciel est très lumineux,
et Denis nous donne notre première leçon d’astronomie.
Michèle décide de bivouaquer, Cathy et Eyup font de même. Seule dans ma
grande tente, cette nuit-là, je prends conscience que,
cette fois, nous sommes
vraiment " ailleurs ". Grand silence de cette première nuit
avant, au petit matin, le grondement de l’orage.
Christine Reiser
18 avril
Nous nous réveillons très tôt (5 heures 30) avec le chant des oiseaux
et
le tonnerre ! La pluie menace…Cathy, Eyup et Michèle ont dormi à la belle étoile et qu’elles étaient
belles ces étoiles !
D’ailleurs nous avions eu la veille des précisions sur la voûte céleste par
notre astronome Denis.
Avant de prendre notre petit déjeuner, nous procédons à la
" loterie "
pour les porteurs ; cette loterie a lieu
traditionnellement en fin de trek,
il y en aura donc deux pour ce trek (en fait
c’est pour se délester d’un chargement
de vêtements collectés par Alain
B).
Il pleut cette fois, mais il faut quand même partir. Notre marche débute
par
quelques glissades et dérapages dus à l’averse
qui devient de plus
en plus
forte.
Nous devons même faire une pause pour nous abriter dans
une bergerie.
Avec nos larges capes de pluie, nous ressemblons à des toiles de tente
ambulantes.
Les terrasses sous la pluie sont magnifiques ; le vert tendre du maïs
tranche avec l’ocre de la terre.
Nous arrivons à Sundalabari pour le repas de midi et là, notre charmante
équipe nous a préparé
une succulente orangeade.
Nous sommes installés près
d’une maison abandonnée qui servira pour l’occasion de cuisine.
Au menu, nous avons
une salade
de choux, carotte, un peu de jambon,
du fromage
de yack
et de la mangue
en dessert. C’est exquis comme toujours.
La pluie est incessante mais nous devons avancer. Nous faisons une petite
pause
à Gyampesal où un joueur de sarangui nous accompagne pour chanter
" Resam Firiri " et " Frères Jacques "
(en canon,
s’il vous plaît).
Nous poursuivons et c’est sous le soleil
de plomb cette fois que nous entamons
une de nos premières " ascensions " népalaises.
Arrivés à Moulawari (lieu de notre second campement), nous admirons le site
splendide et en profitons pour nous ressourcer.
Denis, toujours en grande forme, donne
un cours de gymnastique aux enfants
gurungs du village proche.
Nous rejoignons ensuite nos tentes pour nous relaxer
et nous remettre de cette
longue journée de marche avant d’aller savourer notre repas du soir, que nous
finirons d’ailleurs par un excellent digestif
du Haut-Doubs, délicate
attention
de Cathy qui décidément pense à tout.
Isabelle Oulikian
19 avril
Réveil à 5 h 35.
Le temps est superbe. La plate-forme
sur laquelle nous campons constitue
un
excellent observatoire.
Devant nous, les cimes enneigées d'Himal Chuli, de Ngadi Chuli et d'une partie
du massif des Ganesh Himal.
Derrière, plusieurs étages de "collines"
se dessinent, séparées
par des écharpes de brume bleutée qui soulignent leur moutonnement. Quelques
appareils photo crépitent.
Les préparatifs du matin ont déjà acquis les automatismes d'un rituel :
premier thé (tiya) servi sous l'auvent de la tente, suivi de la bassine d'eau
tiède (la source a été chiche ce matin : la toilette est rapide,
on fera
mieux à Laprak) ; les affaires entassées dans les sacs
et les sacs bouclés, les tentes sont bien vite repliées et déjà emportées
|